"Ma Banque s'oppose à mon changement d'assurance de prêt immobilier ! "
C’est une première! L’UFC-Que Choisir a intenté une action en justice contre une banque, LCL en l’occurrence, accusée d’avoir empêché certains de ses clients de changer d’assurance-emprunteur, comme la loi le permet. L’association de consommateurs affirme avoir recueilli «une centaine de plaintes» à ce sujet de la part de clients qui dénoncent des mesures dilatoires visant à les décourager de changer d’assureur.
Parmi les méthodes les plus courantes, le silence de la banque alors que la loi lui impose, depuis 2010, de donner sa réponse à une demande de changement d’assurance, dans un délai de 10 jours. «Les clients attendent parfois plus d’un an et lorsqu’ils obtiennent une réponse positive, ils sont doublement prélevés pendant plusieurs mois. Le manque à gagner s’élève à plusieurs centaines d’euros», explique Gaëtan Dupin, juriste à l’UFC-Que Choisir. Le Figaro a, de son côté, reçu le témoignage de trois clients (voir ci-dessous).
Mais LCL n’est pas la seule banque dans ce cas-là. «Nous avons également reçu des plaintes de clients des autres principaux groupes bancaires. Nous sommes en train de les analyser et nous ne nous interdisons pas de lancer également une action de groupe contre eux», affirme Gaëtan Dupin.
Témoignages
Une quadragénaire, salariée, habitant dans les Yvelines (78)
«J’ai voulu changer d’assurance de prêt en mars dernier car j’en avais trouvé une plus intéressante. Ce n’est qu’en mai que j’ai enfin reçu une réponse de la banque, pour me demander de mettre à jour le certificat d’adhésion de la nouvelle assurance, qui a été envoyé immédiatement à LCL.Puis il a fallu attendre à nouveau deux mois, jusqu’à fin juillet, pour que LCL vienne enfin me dire qu’ils avaient reçu ce document et enfin procéder au changement d’assurance.Au total, cela m’a coûté plus de 180€!»
Un salarié cadre, proche de la soixantaine, habitant dans les Bouches-du-Rhône (13)
«Je suis un client du Crédit Lyonnais (LCL) de longue date et j’estime que leur attitude à mon égard est inqualifiable. J’ai en effet changé d’assurance au cours de l’année dernière. Mais, entre ma demande de changement et sa prise en compte par LCL, un an a passé. Et dans son courrier, LCL précisait que la date à laquelle le changement aurait lieu serait 9 mois plus tard. C’est parfaitement scandaleux! Au total, je pense avoir perdu plusieurs centaines d’euros à cause de leur incurie.»
Un couple de trentenaires, cadre et profession libérale, habitant en Seine-Saint-Denis (93)
«Sur les conseils de notre courtier, mon mari et moi-même avons demandé à changer d’assurance-emprunteur juste après avoir pris notre prêt chez LCL, car il nous a expliqué qu’il faut le faire dans la première année (la loi Hamon permet à un emprunteur de résilier à tout moment son assurance lors de la première année, NDLR). Heureusement que nous nous y sommes pris très tôt, car la banque a mis presque deux mois pour accepter notre demande, en nous indiquant que nous recevrions prochainement un avenant de substitution». Le précieux document leur est finalement parvenu une dizaine de jours plus tard.
Que dit la loi sur le changement d’assurance emprunteur?
Depuis le 1er janvier 2018, les emprunteurs immobiliers peuvent changer d’assurance tous les ans. Plusieurs députés de la majorité et l’UFC-Que Choisir ont souhaité que la résiliation puisse se faire à tout moment. Mais le Parlement en a décidé autrement: vous devrez attendre un an pour vous tourner vers la concurrence.
Néanmoins, deux modifications ont été apportées: la date anniversaire de la résiliation devra être communiquée chaque année à l’emprunteur «sur un support papier ou durable (clés USB, courriers électroniques…), dès réception par le prêteur de cette offre signée et mentionnée sur toute documentation mise à la disposition de l’emprunteur et relative à son prêt (notamment l’offre de prêt)», comme le précise la loi (article 42 bis du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique).
Un bémol: la banque pourra attendre jusqu’à 15 jours avant la date anniversaire du contrat (article L113-12-2 du code des assurances). Un délai jugé trop court par les associations de consommateurs pour effectuer les démarches nécessaires. Autre changement: si cette règle n’est pas respectée, les banques pourront désormais être sanctionnées financièrement: jusqu’à 15.000 euros ou 3000 euros si le prêteur est une personne physique.
Des baisses de 10% à 40%
Si la part de marché des banques reste très élevée (autour de 85%), la concurrence sur le marché de l’assurance de prêt s’est nettement améliorée depuis 2010, constate le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) dans son dernier rapport. «Les consommateurs sont les principaux bénéficiaires avec des tarifs réduits et des garanties renforcées», se félicite le CCSF qui note des baisses allant de 10% à 40%. «Lorsqu’ils y sont contraints, par des clients qui parviennent à faire valoir leur droit au libre choix de leur assurance, les établissements bancaires finissent par modérer leurs très importantes marges en s’alignant sur les prix des acteurs alternatifs», déclare l’assureur mutualiste Macif.
L’instance se fait aussi l’écho de «difficultés dans le processus de commercialisation» dues à «l’organisation interne des banques» et des carences «dans l’information transmise aux clients sur les conditions d’indemnisation et sur les produits proposés». Deux sujets pour lesquels le CCSF envisage d’organiser des séances de travail «dans l’année à venir».
Source : Boursorama